Dimanche 10 septembre : (suite)
Richard nous amène alors jusqu’au bout des terrasses pour nous monter le trône de l’Inca, qui était peut-être un autel de sacrifice taillé dans la roche affleurant à cet endroit. Comme si le timing avait été parfaitement calculé, nous sommes de retour devant l’église, pile-poil au moment où débarque un groupe de danseurs masqués, suivi par des musiciens et les notables, pour parader autour de la grande place du village. La plupart des danseurs, habillés en berger avec un (faux) lama accroché dans le dos, portent une cagoule blanche en laine et tiennent une fronde à la main. D’autres ressemblent à une pelote de laine rouge et blanche géante. Ces danseurs sont ceux qui vont monter en procession à 4.800 mètres d’altitude pour apporter des offrandes (au dieu Apu, le dieu inca des montagnes ?) à l’occasion des fêtes de la Vierge de la Nativité. La femme qui danse avec les bergers va-t-elle aussi faire partie de cette expédition ? Pour Richard, ce n’est pas une femme, c’est juste un homme ayant revêtu des habits de femme. Ce groupe qui vient de faire un premier tour de la place alors que nous les observions depuis le parvis de l’église, entame ensuite un second tour alors que nous sommes au centre de la grande place. Nous avons une chance inouïe de pouvoir assister à une telle parade !
Nous continuons la visite de Chinchero par le marché qui a lieu tous les dimanches, en contre-bas de la grande place. Celui-ci, abrité sous des petits toits, est très intéressant. Il est organisé en plusieurs parties : une zone de jeu pour les enfants, une zone de jeu pour les adultes où est vendue de la chicha, une zone pour manger, une zone pour la vente d’articles "Made in China" (comme des bassines en plastique), une zone pour la vente des fruits et légumes, une zone pour différents gâteaux, etc... Près d’une des belles arches matérialisant les entrées du marché, de grande quantités d’herbe sont en vente : c’est de l’herbe pour nourrir les élevages de cochons d’Inde (les paysans de la région ont généralement un petit élevage comme autrefois les paysans français avaient un petit élevage avec une dizaine de lapins). Bien évidemment, une zone de ce marché est réservée à l’artisanat mais cela n’a heureusement pas envahi tout le marché. Richard nous conseille de rechercher les tissages de couleurs ternes car ceux de couleurs vives ont plus de chance d’avoir été fabriqué en Chine. Les vendeuses de ces étals mettent en avant des grandes couvertures qui ne nous intéressent pas mais Anne-Marie trouve cependant une petite pochette en laine qui lui fait envie. Son prix initial est de 18 soles mais Christophe propose 15 soles pour avoir un prix rond, prix qui est accepté par la vendeuse, bonne affaire (presque 17 % de rabais, ce qui est très largement suffisant) !
Nous restons un quart d’heure sur le marché avant de reprendre la voiture, direction les terrasses (ou cercles) de Moray que nous rejoignons par une piste parfois étroite et chaotique (et presque vertigineuse). Nous découvrons alors toute l’ingéniosité des Incas en matière d’agriculture ! Tout d’abord, c’étaient de très bons paysagistes car l’ensemble des terrasses concentriques qui descendent de la colline, avec les escaliers en zigzag faits de longues pierres dépassant des murs, est visuellement très spectaculaire. C’est aussi très beau, même s’il y a fort à parier que les Incas n’ont pas pensé en priorité à la beauté des lieux mais ont privilégié l’aspect pratique en suivant les courbes de niveaux du sol. Secundo, les Incas étaient surtout de très bons agronomes car ce site était destiné à la recherche agronomique, pour l’acclimatation des plantes des plaines à l’altitude et vice-versa (et ainsi diversifier les cultures à travers tout leur empire). Cela fut possible car, par exemple, entre les terrasses supérieures et celles au plus bas des cercles concentriques, il a été mesuré jusqu’ 5 °C de différence ! Cette variation de température est due, entre autre, aux murs de soutènement qui accumulent de la chaleur durant la journée et la restituent la nuit. Finalement, l’Humanité doit une fière chandelle aux Incas, surtout dans le Sud-Ouest de la France... Sans les Incas, il n’y aurait probablement pas de pommes de terre à la Sarladaise, ni de maïs pour gaver les canards
!
D’ailleurs, à parler de gastronomie, il est l’heure d’aller manger. Richard nous propose d’aller dans un restaurant touristique ou d’essayer un petit restaurant péruvien au centre-ville de Maras. Nous choisissons la seconde option : ça ne sera donc pas gastronomique mais populaire et à très bas prix : 6 soles le menu avec une soupe de quinoa en entrée et un plat au choix. Anne-Marie opte pour l’escalope de poulet panée, servie avec des frites et du riz tandis que Christophe tente un œuf frit à la cubaine, c’est à dire servi avec des bananes frites (c’est pour ça que c’est à la cubaine), des frites et du riz en abondance. Avec une "Cusqueña negra", un Coca-Cola et une grande bouteille d’eau plate de 2 litres, nous en avons pour 25 soles, record du repas du mois cher battu (record inégalé) ! Il y a vraiment moyen de manger pas cher au Pérou... Certes, ce n’était pas excellant mais pas mauvais tout de même et équilibré !