Vendredi 31 août : (suite)

Anne-Marie a aussi une photo de notre maison et la plus âgée nous demande alors pourquoi nous avons une si grande maison ("immense" serait certainement le terme exact qu'elle a utilisé) puisque nous ne sommes que deux, sans enfant ? Pour elle, nous pourrions y vivre avec toute notre famille, parents, sœurs, frères... Au moins, l'atmosphère s'est un peu détendue et la jeune fille sourit maintenant : c'est parfait pour les photos que Christophe lui montre ensuite sur le numérique, elle s'en fout un peu...

Le guide nous emmène ensuite voir une dame occupée à réduire en poudre un morceau d'ocre. Il lui fait aller chercher son pot de graisse pour qu'elle nous montre comment elle mélange l'ocre à la graisse et s'en étale ensuite sur la peau. Elles font ça uniquement pour le maquillage et se parfumer mais aucunement pour se protéger du soleil ou des moustiques (d'ailleurs, le paludisme sévit fortement parmi les Himbas). Pour la démonstration, le guide lui demande de se mettre bien face à la lumière (ce qui est très bien du point de vue du photographe) mais ça manque de spontanéité.

Anne-Marie repère alors des gamins perchés dans un arbuste à l'écart du village et qui jouent à la voiture (en simulant les vibrations de la piste) avec le conducteur à l'avant qui tourne le volant. Nous nous rapprochons alors d'eux et les réactions sont tout de suite plus spontanées. Les gamins veulent se voir en photo sur l'appareil (en essayant d'appuyer au passage sur tous les boutons de l'appareil) mais ils sont aussi spontanés pour d'autres choses, comme essayer d'ouvrir les fermetures de nos sacs à dos, d'ouvrir le bracelet de la montre d'Anne-Marie ou encore essayer de lui enlever son alliance... Il y a fort à parier qu'ils n'ont certainement aucune conscience que c'est du vol. Peut-être que des touristes leur donnent des choses mais ce n'est, à notre avis, pas une bonne chose. Heureusement, ça se finit plus simplement : tous les gamins veulent maintenant tenir la main d'Anne-Marie.

En revenant vers le village, des femmes sont en train de sortir d'une case des sacs remplis de morceaux de bois qui leur sert à se parfumer. Le guide demande alors à la dame qui réduisait en poudre l'ocre de nous faire une démonstration dans sa case. Le guide récupère pour elle quelques braises sur une pierre plate. La dame Himba met alors un de ces morceaux de bois sur les braises. Puis, elle ouvre deux pots de graisses jumelés l'un à l'autre, l'un contient de la graisse rouge et l'autre de la graisse noire qu'elle utilise s'en enduire le cou. Au passage, elle met un peu de graisse rouge sur la main d'Anne-Marie en rigolant, l'ambiance est donc beaucoup plus conviviale, plus détendue. Elle prend ensuite la pierre, le bois dégage alors une fumée odorante (ça sent plutôt bon), et place son cou dans la fumée. La graisse sert à fixer les odeurs. Avant de refermer les pots de graisses, elle les passe au dessus de la fumée pour en parfumer le contenu. Elle nous montre aussi sa coiffe de mariée, tout en cuir couvert de graisse rouge. C'est assez joli. En ressortant de la case, le pantalon d'Anne-Marie a pris aussi quelques couleurs rouges, nous étions accroupis sur un morceau de cuir couvert de graisse.

Avant de quitter le village, nous achetons (sans discuter le prix) un collier dans le pur style Himba : un morceau de cuir couvert de graisse rouge, avec des petits morceaux de fer (certainement des boulons) en décoration. Le guide nous amène alors au puit, en passant au préalable par le cimetière du village. Avant, les Himbas enterraient leur mort en position fœtale, avec la tête vers le haut, ce qui posait un problème car il fallait découper les membres des morts au couteau. Aujourd'hui, ils entèrent leurs morts à l'horizontale (mais il faut plus de pierres). Les tombes de l'ancien chef du village et de son fils sont beaucoup plus occidentales, avec une stèle en béton. Cependant, elles gardent un caractère traditionnel avec des cornes de bœuf prises dans le béton. Les cornes tournées vers le haut signifient que c'était un homme, les cornes vers le bas, une femme. Avant, les bœufs étaient sacrifiés pour la cérémonie, mais personne ne voulait manger la viande car cela leur donnait l'impression de manger le décédé et ils abandonnaient la viande aux animaux sauvages. Aujourd'hui, ils achètent les têtes à la boucherie pour éviter de gâcher de la viande.