Par le trou de la lorgnette !

Article n° 82, publié le 28-Mars-2015, par Christophe.
Catégorie(s) : conseils aux voyageurs.

BD objectivite 1

BD objectivite 2

BD objectivite 3

Objectivité, le maître mot de tous bons journalistes (de magazines «voyage») et donc normalement, par extension, des rédacteurs de guides de voyage... Je ne cherche pas à dénigrer quiconque mais sincèrement, je pense que l'objectivité ne peut pas exister ! Tout simplement parce qu'un journaliste, ou un rédacteur, est avant tout un être humain et que, même s'il a été parfaitement formé, il est totalement impossible qu'un être humain ne commette pas, de temps en temps, une petite erreur surtout sur un critère comme l'objectivité. Par contre, c'est très ennuyeux si cette erreur est intentionnelle ! Alors, comment éviter de tomber dans le panneau ?

Premier souci concernant l'objectivité des journalistes (de magazines «voyage») ou des rédacteurs de guide de voyage : la publicité dont certains guides ou magazines sont tellement friands qu'il y a plus de 70 % de pages de publicité dans ledit guide ou magazine. Comment un journaliste peut-il recommander un établissement quelconque (compagnie aérienne, agence de voyage, hôtel, restaurant, etc...) s'il y a, juste à côté, une publicité pour son concurrent direct ? Certes, il peut citer les deux établissements mais sans pouvoir rédiger de réelle critique... Sans oublier qu'on voit de plus en plus fleurir dans les magazines des publi-communiqués qui ressemblent aux autres articles du magazine mais qui sont en fait des publicités pour un produit, comme par exemple, un article titrant «Génial, les tentes qui se déplient en 3 secondes !» qui ne sert qu'à faire passer le message suivant : «achetez la tente de Bidulothlon-2000 !». Dans un magazine qui publie un tel publi-communiqué, je n'ai encore jamais lu un article qui oserait affirmer qu'il est pratiquement impossible d'accrocher, à un sac à dos, une tente qui, une fois enfin pliée, tient dans une enveloppe de plus d'un mètre vingt de diamètre, la rendant de ce fait très peu pratique pour la randonnée ! Malheureusement, la publicité est un mal nécessaire, personne n'achèterait de guide ou magazine s'ils coûtaient 10 fois leur prix. Il faut donc faire avec... En tant que lecteur, on peut s'en sortir en lisant différents guides ou magazines, pour se faire une idée plus objective des choses, sauf que parfois, ils appartiennent tous au même groupe de presse. Et ne parlons même pas de Bidulothlon-2000 qui n'hésite pas à publier leur publicité dans la plupart des magazines. Mais au moins, si la publicité est visible, on sait à quoi s'en tenir !

Par contre, il y un autre problème beaucoup plus sournois : le fait que les journalistes doivent faire de l'audience pour vendre du papier (ou des minutes de cerveau disponibles pour les publicités qui suivent) ! J'ai en tête un exemple très simple qui aurait pu être fatal à mon premier voyage, en Argentine en janvier 1991. Mi-décembre 1990, soit 2 semaines avant le début de mon voyage, les journaux télévisés français titraient tous : «tentative de coup d'état militaire en Argentine !». On voyait des images de militaires bien énervés descendant de leurs camions, puis on entendait une rafale d'arme automatique et on voyait des images de journalistes se jetant à terre. Sauf que le lendemain, et les jours qui ont suivi, les médias français n'ont plus parlé de l'Argentine, ce qui était étrange pour une actualité aussi importante qu'un coup d'état. Je suis quand même parti avec un ami et nous avons visité «Buenos Aires» où tout était calme. C'était l'été, les gens se prélassaient dans les parcs, bref, tout allait bien ! Nous n'avons pas osé à en parler aux Argentins mais pendant la voyage, nous avons croisé un Français qui était à «Buenos Aires» le jour de ce soi-disant coup d'état. D'après lui, c'étaient juste des militaires en grève qui avaient manifesté devant le ministère des armées, en tirant à blanc pour se faire entendre, car ils n'étaient plus payés depuis des mois (économiquement, ça n'allait pas bien fort en Argentine) ! Sincèrement, je pense que les médias français ont voulu faire du sensationnalisme dans cette histoire et que le fait de ne plus en parler par la suite était une reconnaissance tacite de leur manque d'objectivité flagrant. C'était pourtant, il y a 20 ans... Aujourd'hui, avec la recherche du scoop, pardon du «buzz», à tous prix, beaucoup trop de journalistes ne recherchent plus que le sensationnel, en n'hésitant pas à déformer grossièrement la réalité !

Bien sûr, il y avait les images, les militaires énervés (ce qui fait toujours peur), les journalistes se couchant par terre... Le problème, c'est que même les images peuvent être interprétées, pas forcément en modifiant leur contenu grâce à des logiciels comme Photoshop, mais grâce à leur contexte, les autres images que l'on aura montrées avant et celles que l'on montrera après. Tout n'est question de perception et donc de subjectivité alors qu'on s'attendait à l'objectivité totale des images. La meilleure démonstration que beaucoup de téléspectateurs ont dû voir il y a quelques années, était une publicité télévisuelle pour la chaîne Canal +. Dans cette publicité, Il n'y avait aucune voix off, juste des images brutes : une première séquence avec des femmes et des enfants dans un village qu'on aurait pu imager être en Afghanistan (c'était juste 2 ou 3 ans après les attentas du «World Trade Center»), une seconde séquence montrant des hommes barbus en habit traditionnel, armés de Kalachnikovs, mais ceux-ci ne parlaient pas et ne faisaient aucun geste brusque. La troisième séquence montrait le village de la première séquence en feu et on entendait des cris et des rafales d'armes automatiques, mais on ne voyait aucune personne sur ces images. Et enfin, la dernière séquence montraient des militaires occidentaux, visiblement énervés, qui avançaient au pas de charge (j'espère que ma mémoire n'est pas trop défaillante). Dans cet ordre, on imaginait un paisible village afghan attaqué par des talibans et des militaires occidentaux venant à leur secours. Sauf que pour la seconde partie de la publicité, on revoyait exactement les mêmes séquences mais montées dans un ordre différents et elles racontaient alors une toute autre histoire : des militaires occidentaux qui cherchaient des talibans dans un village et qui commettaient une bavure ! Je vais bien évidemment revenir aux voyages mais j'avais besoin de parler de cette publicité pour montrer que les techniques de «falsification» de la vérité sont très simples et qu'en plus, ça marche à tous les coups car on est tous tenté de croire qu'une image ne peut être qu'objective.

Passons maintenant aux conséquences du manque d'objectivité : cela devient extrêmement dangereux quand les professionnels du tourisme manipulent l'opinion publique pour leur permettre de vendre une destination qu'ils qualifieront de tendance mais qui, simplement, leur permettra d'augmenter leurs marges financières. C'est ce qui s'est passé il y a bien plus d'une dizaine d'années avec la Guadeloupe ! Les tours operateurs venaient de découvrir la République Dominicaine où les salaires sont bien inférieurs aux salaires français (je rappelle que la Guadeloupe est en France, précision malheureusement forte utile) et il y a alors eu une campagne de dénigrement de la Guadeloupe en bonne et due forme, en se basant sur une idée qui fait à chaque fois polémique : les Français sont toujours en grève et n'en foutent pas une, surtout ceux qui vivent sous les tropiques, au crochet des métropolitains qui se lèvent tôt pour aller au travail ! Le pire, c'est qu'aujourd'hui, un grand nombre de «couillons à petite queue» (espèce endémique de France métropolitaine, malheureusement pas en voie de disparition) continuent de colporter cette fausse information à tout va sur les forums de voyageurs ou les réseaux sociaux. Franchement, toutes les personnes à qui j'ai conseillé d'aller en Guadeloupe, en sont revenues enchantées et sont prêtes à y retourner si ce n'est pas déjà fait ! Bien évidemment, je ne leur ai pas conseillé d'aller dans les gros hôtels-club de vacances de St Français mais en gîtes chez l'habitant à Bouillante ou à Marie-Galante qui sont des parties de l'archipel à l'abri du tourisme de masse. Je reconnais que dans les grosses stations touristiques de Grande-Terre, au plus fort de la période touristique, on croise malheureusement quelques (rares) malotrus mais ce n'est pas une raison pour traiter tous les Guadeloupéens de racistes ou d'autres qualificatifs peu recommandables ? Si on compare à la Côte d'Azur, en plein août, on trouve la même proportion de malotrus mais il semblerait que le «couillon à petite queue» les pardonne plus facilement (parce qu'ils sont blancs ?) alors qu'il ne pardonne rien aux Guadeloupéens.

En conclusion, faites attention à ce que vous pouvez lire dans la presse ou dans les guides de voyage et encore plus aux informations que vous pouvez récolter dans les forums sur internet. Ne prenez pas une information, même agrémentée de photos ou d'une vidéo, pour argent comptant mais essayez de la recouper avec d'autres sources ! A ce propos, bien évidemment, nos carnets de voyage ne sont pas objectifs (mais nous n'avons aucune obligation morale de l'être, contrairement aux journalistes) car forcément, nous relayons notre vision des choses, vision déformée par rapport à ce que nous aimons, à notre expérience ou à notre vécu. Il est donc tout à fait normal que nous trouvions une attraction touristique nulle alors que d'autres voyageurs l'ont appréciée, ou au contraire, que nous sublimons une visite alors que d'autres l'ont trouvée chiante. D'ailleurs, ces autres, c'étaient peut-être nous, il y a 20 ans ! Par exemple, j'ai aimé Disneyland, il y 20 ans, mais aujourd'hui, je sauterai certainement cette étape pour privilégier les randonnées au «Grand Canyon». D'où l'intérêt pour quelqu'un préparant un voyage de lire, bien évidemment, notre carnet de voyage (CQFD) mais aussi celui d'autres voyageurs car n'oubliez pas qu'un voyage réussi, ça se mérite (ou il suffit de prendre un billet d'avion pour la Guadeloupe et de réserver une chambre chez l'habitant ;-)) !

PS : Nous rédigeons des carnets de voyage et non pas des guides de voyage ! Même si nous prenons notre temps en voyage, que généralement nous nous attardons dans un endroit plus longtemps que ne le propose la plupart des tours operateurs, cela ne veut pas dire que nous avons le temps de tout visiter dans une ville ou une région donnée. Il nous faut faire des choix et donc des impasses sur certaines visites. Pour établir notre programme de visites, nous lisons, comme n'importe quel voyageur, les indications de plusieurs guides ou carnets de voyage (mais nous évitons de suivre les avis non argumentés des forums internet), nous écoutons les recommandations d'amis et enfin, nous choisissons ce que nous voulons visiter en fonction de ce qui correspond à nos goûts (par exemple, à Rome, nous avons fait l'impasse sur les musées d'art religieux et un grand nombre d'églises, car les tableaux de «Madonna con il Bambino», ça nous saoule au bout d'un moment, alors que nous avons essayé de voir tout ce qui avait trait avec l'architecture Romaine). Donc forcément, ça se ressent dans nos carnets de voyage où nous ne pouvons être ni exhaustifs, ni objectifs. Nous indiquons ce que nous avons visité et aimé, ou pas, un point c'est tout ! Idem pour les restaurants, les bars ou les hébergements...

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