Low cost, low life ?

Article n° 162, publié le 7-Septembre-2019, par Christophe.
Catégorie(s) : réflexions diverses.

BD low cost - 1

BD low cost - 2

BD low cost - 3

Pour baisser les prix des billets, les dirigeants des compagnies aériennes qui vendent du «low cost» (ou à bas coûts), ont diminué, à tort ou à raison, les prestations et la qualité du service au sol et à bord, mais surtout, ils ont baissé les salaires de leurs employés ! Cela signifie des pilotes, des stewards ou des mécaniciens moins payés, qui vont consommer moins et qui vont acheter des voitures «low cost» fabriquées dans des pays où la main d'œuvre est moins chère, ce qui veut dire moins de travail en France, donc plus de chômage et moins d'incitations à augmenter les salaires, donc des salariés français enclins à dépenser moins et à consommer «low cost»... C'est un engrenage infernal qui va nous mener qu'à un seul endroit : chez soi, comme des cons derrière un écran de télé à regarder un match de foot idiot en bouffant des pizzas bourrées d'OGM et de pesticides, bien loin de la Grande Muraille de Chine... Bye-bye les rêves de voyages ! Ai-je tort ? Les bons samaritains que sont les dirigeants des compagnies aériennes qui vendent du «low cost», ne font pas ça, non... Et la marmotte, elle est toujours spécialisée dans le papier alu ?

Alors, prenons un Airbus A320 utilisé pour un vol court ou moyen-courrier. Cet Airbus embarque jusqu'à 180 passagers et consomme 5.400 litres de kérosène à l'heure, ce qui revient à 30 litres par heure et par passager (soit, grosso modo, 3,75 litres par passager aux 100 kilomètres). Pour un vol de deux heures, cet Airbus aura donc consommé 60 litres de carburant par passager ! Sachant que, d'après des infos trouvées (et recoupées) sur internet, les compagnies aériennes achètent le kérosène aux alentours de 0,50 € du litre (détaxé), cela veut dire que pour un vol moyen-courrier de deux heures, le coût du carburant représente au minimum 30 euros, alors que certaines compagnies «low-cost» affichent des prix inférieurs à cela, comme par exemple des offres à 10 euros pour un vol Toulouse - Prague (prix d'appel que l'on obtient jamais, c'est donc quasiment de la publicité mensongère mais tout le monde s'en fout). C'est invraisemblable, non ? Cela veut surtout dire que pour trois passagers payant hypothétiquement 10 euros, les 177 autres payent plus de 50 euros...

Et sur un vol long-courrier ? La consommation horaire d'un Airbus A330 est de 14.400 litres de kérosène. Il peut transporter 400 passagers, cela fait donc une consommation de 36 litres par passager et par heure (soit, grosso modo, 4,50 litres aux 100 km par passager). Pour un vol Paris / «New York» (de plus) de 7 heures, la consommation de kérosène est donc approximativement de 252 litres, soit 126 euros par passager. Cependant, des compagnies «low-cost» proposent des prix à partir de 250 euros. C'est moins choquant que le prix d'un vol moyen-courrier «low-cost» mais ça reste discutable (petit aparté : plus une compagnie a une flotte importante, plus elle consomme et donc achète de carburant, plus elle pourra négocier un prix d'achat du kérosène bas... Une compagnie qui possède 500 appareils, peut donc logiquement acheter le carburant moins cher qu'une compagnie «low cost» qui ne fait voler que 5 appareils, à méditer...) ! En jouant sur le poids des sachets de cacahouètes servis à bord et, surtout, sur le poids des bagages, les compagnies «low-cost» peuvent économiser une vingtaine de litres de carburant par passager (sur les 7 heures de vol d'un long-courrier), ce qui leur permet de diminuer le coût en kérosène d'une dizaine d'euros par passager, mais cela n'explique pas la différence de prix de l'ordre d'une centaine d'euros que l'on peut constater entre un vol «low-cost» et un vol régulier long-courrier...

Autre économie potentielle : certaines compagnies «low-cost» n'utilisent pas les satellites des aéroports (les passerelles mobiles qui permettent de relier directement les portes des avions aux portes d'embarquement des aérogares), les passagers embarquent et débarquent alors grâce à des escaliers positionnés devant les portes avant et arrière des appareils. Est-ce dans l'espoir de gagner du temps et donc de payer moins de temps de parking dans les aéroports ? Le petit hic est que, en prenant en exemple ce qui ce passe à l'aéroport de Toulouse, les passagers empruntent un seul et unique escalier pour descendre ou remonter dans le satellite devant lequel l'avion est tout de même stationné : le goulet d'étranglement est donc le même qu'en utilisant une seule porte de l'avion raccordée au satellite et je n'ai pas l'impression que les compagnies «low-cost» gagnent vraiment du temps en procédant ainsi ! Là encore, je ne vois pas comment ces potentielles dizaines de secondes de gain de temps puissent expliquer la différence de prix !

Une dernière piste d'économie ? L'utilisation d'aéroports moins fréquentés comme Carcassonne ou Beauvais, où les taxes (atterrissages/décollage ou de parking) sont moins importantes ? Pour défaire cette hypothèse, il n'y a qu'à observer les prix sur les sites internet des compagnies «low-cost» ! Première exemple : la même compagnie propose un Toulouse - Londres à 20 euros contre 38 euros pour un Carcassonne - Londres (prix d'appel, impossibles à obtenir, bien évidemment). Autre exemple : un Beauvais - Londres à 77 euros contre 73 euros pour un Roissy - Londres avec une autre compagnie «low-cost» ! Si en plus, on prend en compte le prix du trajet pour rejoindre ces aéroports exotiques (par exemple, il faut compter 10 euros pour un Toulouse - Carcassonne en bus et il n'y a que 4 rotations par jour ; donc si le vol est programmé très tôt le matin, il faut ajouter le prix d'un hébergement), quelqu'un habitant près de Toulouse (ville où le nombre de voyageurs est potentiellement bien plus important que dans les environs de Carcassonne) ne devrait logiquement pas prendre de vol depuis Carcassonne. C'est donc assez clair que le taux de remplissage des avions est bien plus important pour déterminer le prix des vols, que les taxes aéroportuaires qui semblent finalement négligeables, tout comme le prix du kérosène... C'est d'ailleurs ce qui me dérange le plus : ces compagnies «low cost» n'hésitent pas à recourir au surbooking pour assurer un taux de remplissage maximum de leurs vols, ce qui veut dire des annulations / reports de vol pour certains passagers sans le moindre préavis (et si le taux de remplissage d'un vol est trop bas, celui-ci est aussi supprimé, presque sans préavis).

Mais, faut bien comprendre ma pauv' dame, on n'a pas l'argent pour payer plus ! Je comprends bien que sans les compagnies «low cost», des personnes ne pourraient pas voyager, et que des personnes qui voyageaient avant en utilisant des compagnies régulières, voyagent aujourd'hui plus souvent avec des compagnies «low cost», mais il n'empêche que ces compagnies «low cost» ont généré des effets de bord qui m'énervent au plus haut point car les compagnies régulières se sont senties obligées de les suivre ! Par exemple, en proposant un tarif sans bagage en soute, les passagers optent de plus en plus pour ce tarif, et voyagent de plus en plus avec un bagage cabine (en plus d'un gros sac à dos et d'un tas de sacs de duty-free ; bagages autorisés car c'est une compagnie régulière non aussi stricte sur les bagages en cabine que le sont les «low cost»). Et dans un appareil comme un Embraer E-190, il n'y a pas de place pour ranger tous ces bagages dans les coffres situés au-dessus des sièges, loin de là ! Finalement, tous les sacs partent en soute... Le gain est chiffrable pour le passager mais l'est-il pour la compagnie aérienne ?

Autre exemple d'absurdité : la suppression du service «gratuit» de boissons, chaudes ou froides, en court et moyen-courrier sur certaines compagnies régulières (ainsi les hôtesses ont moins de travail, c'est donc normal de moins les payer, non ?) ! En mode «low cost» sur une compagnie régulière et britannique, on peut toujours acheter à bord une grande tasse de thé (350 ml) mais celle-ci est à bien plus de 2,50 euros ! Même sans être radin (et que c'est le prix dans n'importe quel café parisien), qui va acheter cette tasse de thé à ce prix ? Réponse : personne (à une ou deux exceptions près) ! Certes, avant, on payait systématiquement (et indirectement) pour une petite tasse de thé et un petit sachet de gâteaux secs, dont on n'avait pas forcément besoin, mais aujourd'hui, le passager dépense bien plus s'il veut boire quelque chose (et les hôtesses ont finalement autant de travail pour faire fonctionner la machine à carte bancaire pour les deux passagers qui ont pris une boisson chaude). Dans ce cas, il y a un très léger gain sur la consommation de kérosène durant le vol car la compagnie embarque moins de boissons chaudes mais cela est-il vraiment signifiant ?

Tous ces exemples ne vous paraissent pas aberrants ? Je n'arrive pas à comprendre l'intérêt des voyageurs pour le «low cost» mais je sais bien que je n'ai pas le profil pour ces compagnies : j'habite à Toulouse et je voyage souvent hors d'Europe, pour deux semaines minimum. J'ai donc besoin d'un préacheminement sûr pour rejoindre un grand aéroport européen (Paris, Amsterdam, Londres, Munich...) avec mes bagages et dans ce cas, les compagnies régulières sont largement concurrentielles côté prix, surtout si on n'oublie pas de prendre en compte les frais annexes pour gérer tant bien que mal une correspondance entre deux vols «low cost», comme par exemple une nuit à l'hôtel ou un trajet en RER entre Orly et Roissy. Certes, si je me contentais de passer quelques week-ends par an dans des capitales européennes, où je me contenterais du minimum côté matériel photo (ce qui est vraiment inenvisageable) pour n'avoir qu'un seul bagage en cabine, peut-être que le «low cost» aurait un intérêt... Mais quand je prévois un voyage, je n'aime pas spécialement les imprévus et surtout pas l'annulation du voyage suite à un vol annulé à la dernière minute pour cause de surbooking ou de grève («animation» fréquente pour une compagnie irlandaise ultra «low cost» ; quand nous sommes partis l'année dernière à Lisbonne, nous avons eu le choix entre la TAP et cette fameuse compagnie irlandaise, et heureusement que nous avions choisi la TAP sinon, nous serions restés à Toulouse pour cause de grève). Même si, par malheur, je ne pouvais plus voyager comme je l'ai fait ces dernières années, je ne pense pas que le «low cost» serait une solution pour continuer de voyager : la déception serait immense si le seul week-end par an qu'on pourrait encore s'offrir, était purement et simplement annulé car, même si le vol annulé pourrait hypothétiquement être remboursé (ce qui est loin d'être systématiquement le cas), avec une annulation à la dernière minute, l'hébergement ne le serait pas ! Pour moi, ça ne vaut pas le coup de jouer à la roulette russe avec ses vacances, juste pour économiser quelques euros !

PS : Alors, finalement, le «low cost» avec toutes ses incohérences, ne vous semble-t-il pas être un complot des gouvernements bobo-gaucho-écolo-ultra-libéraux destiné à casser les syndicats dans les compagnies aériennes régulières, faire baisser les salaires, créer du chômage et avilir le bon peuple ? Attention, il y a un piège dans cette question ;-) !

-- Accueil du blog --
-- Article précédent du blog --
-- Article suivant du blog --
-- Carnet de voyage --
© 2024 AMVDD.FR